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Emmanuel Macron pensait entretenir un lien « privilégié » avec Donald Trump. Mais au sommet du G7 de Kananaskis, au Canada, l’illusion s’est de nouveau brisée. L’ancien président américain, revenu sur la scène internationale avec la brutalité qu’on lui connaît, a publiquement taclé son homologue français, le traitant de « chic type » qui « ne comprend jamais rien ». Une pique cinglante lancée sur Truth Social, après que Macron a évoqué un projet de cessez-le-feu entre Israël et l’Iran en y associant une initiative américaine... sans l’aval de Trump.
La diplomatie version Trump : imprévisible, brutale, humiliante
L’objet du courroux trumpien ? Une déclaration du président français à la presse, selon laquelle « le président Trump s’engage personnellement dans les prochaines heures à obtenir un cessez-le-feu entre Israël et l’Iran ». Une formulation qui, selon Trump, relève de l’« autopromotion » et déforme son projet réel, qu’il qualifie de « bien plus vaste qu’un simple cessez-le-feu ».
Dépité ou stratège, Trump a quitté le sommet un jour plus tôt que prévu, snobant au passage la session spéciale sur l’Ukraine et son président Volodymyr Zelensky, qu’il avait déjà humilié publiquement en 2020. Une manière pour lui d’asseoir, une nouvelle fois, sa domination symbolique.
Macron joue la carte de l’indifférence… pour sauver la face ?
Interrogé sur cette attaque, Emmanuel Macron a relativisé : « Ce n’est qu’une péripétie ». L’ancien banquier devenu chef d’État connaît le personnage. Il sait que Trump, coutumier du fait, n’a pas d’alliés, seulement des occasions de briller. En privé, Macron assure « en avoir vu d'autres » – mais en coulisses, l’agacement est palpable.
Car l’épisode ne vient pas de nulle part. Les relations entre les deux hommes alternent depuis 2017 entre main tendue et coups de poignard. Poignées de main viriles, dîners d’apparat, symboles orchestrés – comme l’invitation de Trump à Paris pour la réouverture de Notre-Dame en décembre dernier – n’auront pas suffi à amadouer durablement l’homme fort du Parti républicain.
Entre Israël, Iran et Ukraine : tensions géopolitiques et ambitions personnelles
Ce qui inquiète surtout, c’est le fond du dossier. Derrière la querelle d’ego se joue une partie géopolitique risquée. En évoquant la volonté d’Israël de « renverser le régime iranien » à travers des frappes, Macron a ouvertement critiqué une stratégie que Trump a longtemps défendue, notamment lors de son premier mandat en 2018, lorsqu’il avait unilatéralement quitté l’accord sur le nucléaire iranien.
L’actuel retour des tensions Israël-Iran, sur fond d’attaques croisées et d’escalade militaire, rappelle combien la région est inflammable. Si Trump veut s’imposer en faiseur de paix, c’est aussi pour renforcer son image à l’approche de la présidentielle américaine. Mais ses méthodes, et surtout son absence de constance, inquiètent même ses alliés.
Quant à l’Ukraine, le refus de rencontrer Zelensky à Kananaskis est un signal fort : Trump reste ambigu sur le sort de Kiev, alternant entre soutien rhétorique et volonté de rapprochement avec Poutine. Une posture que Macron tente – en vain – de faire infléchir, notamment lors de sa visite à Washington en février dernier.
Un partenaire imprévisible, une Europe dépassée
Pour Célia Belin, spécialiste des États-Unis au Conseil européen des relations internationales, « Macron a l’expérience de la bonne attitude à avoir avec Trump, mais cela ne garantit rien ». Le président français semble bien seul, face à un partenaire américain qui pratique l’humiliation comme outil diplomatique.
Jean-Louis Bourlanges, ancien président de la commission des Affaires étrangères, a résumé le sentiment général : « L’insulte publique est sa méthode préférée. Il méprise ses collègues, les rabaisse, les instrumentalise. C’est un comportement indigne d’un dirigeant démocratique ».
Conclusion : vers une diplomatie des nerfs
À l’heure où les tensions géopolitiques s’intensifient – de l’Iran à l’Ukraine, en passant par le Groenland que Trump avait, déjà, voulu acheter en 2019 – les États européens peinent à exister face à un partenaire américain redevenu central… mais profondément imprévisible. Emmanuel Macron, en première ligne, continue de jouer le funambule. Mais à chaque gifle, la corde se tend un peu plus.