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Et si le monde refusait de commercer avec les États-Unis ?

Une illustration de style caricature politique représentant l'Oncle Sam assis seul sur une petite île, entouré de conteneurs d'expédition flottant au loin. Il a l'air angoissé, tenant un document d'accord commercial brisé, tandis que le reste du monde (représenté par les drapeaux de divers pays) fait des affaires sans lui. L'arrière-plan représente un paysage économique orageux, avec un billet d'un dollar qui coule dans l'océan.

Les États-Unis ont longtemps imposé leur volonté économique au reste du monde, utilisant leur puissance financière et leur influence politique pour façonner le commerce international à leur avantage. Mais que se passerait-il si, excédées par les menaces de surtaxes douanières et l’unilatéralisme américain, les autres nations décidaient de couper les ponts économiques avec Washington ?

Serait-ce la fin de la domination américaine, ou bien l'Amérique trouverait-elle un moyen de rebondir ?

Un déficit qui n’existe que parce que le monde l’accepte

L’un des paradoxes fondamentaux de l’économie américaine est qu’elle repose sur un déficit commercial permanent. En 2023, les États-Unis affichaient un déficit de près de 1 000 milliards de dollars, ce qui signifie qu’ils importent bien plus qu’ils n’exportent.

Ce déficit est rendu possible par un privilège unique : le dollar est la monnaie de réserve mondiale. Cela signifie que les États-Unis peuvent payer leurs dettes en émettant toujours plus de dollars, et que d’autres pays acceptent cette monnaie en raison de sa place centrale dans le commerce mondial.

Mais que se passerait-il si le reste du monde décidait de ne plus commercer en dollars et d’arrêter d’exporter vers les États-Unis ?

  • L’Amérique, qui importe une grande partie de ses produits manufacturés, se retrouverait dans une situation critique. Plus de smartphones assemblés en Chine, plus de voitures allemandes, plus de composants électroniques asiatiques…
  • L’économie américaine, qui s’est massivement désindustrialisée depuis les années 1980, serait incapable de répondre à la demande interne dans de nombreux secteurs.
  • L’inflation exploserait, car les rares produits encore disponibles sur le marché deviendraient hors de prix.

Autrement dit, l’économie américaine tient aujourd’hui sur une acceptation tacite : le monde accepte ses dollars et son déficit… tant que cela sert ses intérêts.

Quand l’Amérique ne vend plus au monde

L’autre revers de la médaille, c’est que si les États-Unis sont les plus gros importateurs mondiaux, ils restent aussi un grand exportateur.

Si le monde cessait de commercer avec eux, certaines industries américaines s’effondreraient immédiatement :

  • L’aéronautique : Boeing, l’un des piliers de l’industrie américaine, vend ses avions partout dans le monde. Une rupture commerciale avec l’Europe et l’Asie signifierait la fin de son monopole face à Airbus.
  • La technologie : Microsoft, Apple, Google et Amazon vendent leurs services numériques et leurs produits dans le monde entier. Une exclusion du marché mondial les affaiblirait considérablement, notamment face à la montée des alternatives chinoises et européennes.
  • L’agriculture : Les États-Unis exportent massivement du soja, du blé et du maïs, notamment vers la Chine. Une guerre commerciale totale signifierait des pertes colossales pour les agriculteurs américains.

Le choc serait encore plus violent sur Wall Street, où des milliards de dollars d’investissements étrangers soutiennent la valeur des entreprises américaines. Si ces capitaux fuyaient vers d’autres marchés, les indices boursiers américains s’effondreraient.

Les États-Unis, une île… mais pas autosuffisante

Face à un isolement commercial, certains optimistes pourraient argumenter que les États-Unis disposent de toutes les ressources nécessaires pour survivre.

C’est vrai :

  • Le pays est riche en pétrole et en gaz, notamment grâce à la révolution du pétrole de schiste.
  • Il a des terres agricoles capables de nourrir sa population.
  • Il possède encore un savoir-faire technologique avancé.

Mais en réalité, l’Amérique dépend du commerce mondial bien plus qu’on ne l’imagine.

  • Les infrastructures industrielles ne sont plus là : les usines ont été délocalisées en Asie depuis des décennies. Produire des voitures, des téléphones ou même des vêtements aux États-Unis coûterait bien plus cher que d’importer ces biens.
  • La main-d’œuvre qualifiée manque : Les ouvriers spécialisés sont devenus rares aux États-Unis, car l’industrie manufacturière a été délaissée au profit des services. Relancer une production locale prendrait des années.
  • L’inflation deviendrait incontrôlable : Privée d’importations bon marché, la consommation américaine chuterait drastiquement, et le coût de la vie exploserait.

Bref, l’idée d’une Amérique autosuffisante est un mythe.

Qui a le plus à perdre ?

Évidemment, une rupture commerciale totale avec les États-Unis ne serait pas indolore pour le reste du monde.

  • L’Europe serait affectée, notamment dans des secteurs comme l’automobile ou l’aéronautique.
  • La Chine perdrait un de ses plus gros clients, mais pourrait compenser en développant son marché intérieur et en renforçant ses liens avec d’autres régions (Asie du Sud-Est, Afrique, Amérique latine).
  • Les pays pétroliers devraient revoir leur stratégie, car les États-Unis restent un consommateur majeur d’énergie.

Cependant, contrairement aux États-Unis, ces économies sont déjà en train de diversifier leurs échanges. La Chine développe son propre écosystème technologique, l’Europe renforce ses liens avec d’autres marchés émergents, et même les pays du Golfe investissent dans de nouvelles industries pour sortir de leur dépendance au pétrole.

En revanche, pour les États-Unis, un isolement commercial signifierait une véritable implosion de leur modèle économique basé sur :

  1. Une dette gigantesque financée par des investisseurs étrangers.
  2. Une consommation de masse alimentée par des importations bon marché.
  3. Un dollar dominant, mais qui pourrait perdre sa suprématie si d’autres pays choisissaient de le contourner.

Conclusion : une dépendance à double tranchant

Les États-Unis ont longtemps utilisé leur puissance économique comme une arme politique. Mais cette dépendance fonctionne dans les deux sens : si le reste du monde décidait de couper les liens commerciaux, l’Amérique serait peut-être la plus grande perdante.

Ce scénario reste hautement hypothétique, car une rupture totale n’aurait que des perdants. Cependant, il montre bien que l’hégémonie économique américaine repose plus sur un équilibre fragile que sur une invincibilité réelle.

En jouant trop avec le feu – en menaçant ses alliés de surtaxes, en déclenchant des guerres commerciales, en utilisant le dollar comme outil de sanction –, les États-Unis prennent un risque : un jour, le reste du monde pourrait décider qu’il peut se passer d’eux.

Et ce jour-là, l’Amérique se rendra compte qu’elle était bien plus dépendante du monde… que le monde ne l’était d’elle.

Le monde pourrait-il vraiment couper les ponts commerciaux avec les États-Unis ?

ci dessus , nous avons imaginé un monde où les États-Unis se retrouveraient isolés économiquement, incapables d’importer et d’exporter en raison d’une rupture totale des échanges. Un scénario catastrophe qui, s’il devenait réalité, plongerait l’Amérique dans une crise sans précédent.

Mais ce scénario a-t-il des chances de se produire ? Le monde peut-il vraiment se passer des États-Unis ? Analysons les forces en présence.

Pourquoi ce scénario est peu probable (du moins à court terme)

  1. Une interdépendance encore trop forte
    Les États-Unis sont le premier importateur mondial, mais aussi l’un des principaux exportateurs de produits agricoles, technologiques et industriels. Une rupture commerciale totale signifierait non seulement des difficultés pour l’Amérique, mais aussi pour ses partenaires.

    • L’Europe dépend des GAFAM pour ses infrastructures numériques.
    • La Chine vend des milliards de dollars de produits aux États-Unis chaque année.
    • Le marché financier américain est une plaque tournante pour l’investissement mondial.

    Couper les liens reviendrait à scier la branche sur laquelle beaucoup de pays sont assis.

  2. Le dollar reste (pour l’instant) incontournable
    Bien que certains pays tentent de diversifier leurs réserves de change, le dollar reste la monnaie dominante pour le commerce mondial et les transactions financières.

    • Près de 60 % des réserves de change mondiales sont toujours en dollars.
    • Les matières premières comme le pétrole sont largement échangées en billets verts.
    • La dette américaine, détenue par la Chine et d’autres pays, reste une référence sur les marchés.

    Tant que le monde utilise le dollar, il a tout intérêt à maintenir des relations commerciales avec les États-Unis.

  3. L’allié incontournable des démocraties occidentales
    Malgré leurs tensions, l’Europe et les États-Unis restent des partenaires stratégiques. Un isolement économique total affaiblirait l’Occident face à la montée de puissances comme la Chine.

    Il y a des tensions commerciales (cf. les menaces de surtaxes de Trump), mais personne ne veut déclencher un véritable divorce.

Pourquoi ce scénario pourrait devenir plausible à long terme

  1. Un rejet progressif du modèle américain
    De plus en plus de pays cherchent à réduire leur dépendance aux États-Unis. L’Europe tente de bâtir une autonomie technologique, la Chine développe son yuan numérique, et la Russie évite autant que possible les transactions en dollars.

    Certains signaux montrent une volonté de s’émanciper :

    • Les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) discutent d’un système de paiement alternatif au dollar.
    • L’Arabie saoudite commence à vendre son pétrole en yuan, une hérésie il y a encore quelques années.
    • L’Afrique, l’Asie du Sud-Est et l’Amérique latine explorent de nouvelles alliances économiques indépendantes des États-Unis.

    Si cette tendance s’accélère, les États-Unis pourraient voir leur influence commerciale s’éroder.

  2. Le retour du protectionnisme américain
    Avec des dirigeants comme Trump, les États-Unis menacent régulièrement d’imposer des barrières commerciales et des surtaxes douanières. Cela pousse leurs partenaires à chercher des alternatives.

    Si l’Amérique s’isole volontairement par une politique protectionniste agressive, elle pourrait finir par provoquer la rupture elle-même.

  3. Un endettement insoutenable
    La dette américaine atteint des niveaux vertigineux. Tant que les marchés financiers font confiance aux États-Unis, ils peuvent continuer à emprunter. Mais si un jour cette confiance disparaît (perte du statut du dollar, krach obligataire), les investisseurs étrangers pourraient fuir.

    • Si la Chine, le Japon ou les pays du Golfe cessent d’acheter la dette américaine, l’économie des États-Unis vacillera.
    • Une crise du dollar forcerait d’autres nations à trouver des alternatives monétaires.

    Une telle situation ne provoquerait pas une coupure nette des relations commerciales, mais elle affaiblirait grandement la domination économique américaine.

Alors, rupture ou adaptation ?

En conclusion, un isolement total des États-Unis reste hautement improbable dans l’immédiat. Mais les tendances actuelles montrent que de nombreux pays cherchent à se libérer de leur dépendance à l’économie américaine.

L’avenir dépendra de plusieurs facteurs :

  • Si les États-Unis continuent leur politique protectionniste, ils pourraient accélérer leur propre isolement.
  • Si le dollar perd son statut de monnaie mondiale, d’autres blocs économiques pourraient émerger.
  • Si les relations diplomatiques se détériorent, des alliances commerciales alternatives pourraient se solidifier.

Plutôt qu’un choc brutal, on pourrait donc assister à un glissement progressif vers un monde plus multipolaire, où les États-Unis seraient encore un acteur majeur… mais plus hégémonique.

L’Amérique est-elle prête pour ce changement ? Rien n’est moins sûr.

Jusqu’où Trump est-il prêt à bluffer ?

Donald Trump, c’est un peu comme un joueur de poker qui mise gros avec un jeu bancal… et qui gagne quand même parce que les autres ont peur de le voir tout faire exploser. Mais jusqu’où peut-il pousser son bluff avant que quelqu’un ne le suive pour voir ses cartes ?

Un maître du bluff politique et économique

S’il y a bien une chose qu’on ne peut pas enlever à Trump, c’est son talent pour le spectacle. En affaires comme en politique, il a toujours utilisé les mêmes stratégies :

  • Menacer fort pour faire plier l’adversaire.
  • Créer du chaos pour prendre l’avantage.
  • Ne jamais admettre la défaite, quitte à redéfinir les règles du jeu.

Cela a fonctionné avec ses électeurs, qui voient en lui un "deal maker" prêt à tout pour défendre l’Amérique, et parfois même avec des leaders internationaux, déstabilisés par son imprévisibilité.

Mais jusqu’où peut-il aller avant que le bluff ne se retourne contre lui ?

L’économie : Trump peut-il forcer le monde à jouer selon ses règles ?

Trump a déjà montré qu’il est prêt à miser très gros sur la guerre commerciale.

  • Avec la Chine, il a imposé des surtaxes massives sur des milliards de dollars d’importations, pensant que Pékin plierait. Résultat ? La Chine a riposté, et ce sont surtout les entreprises américaines qui ont souffert.
  • Avec l’Europe, il a menacé de surtaxer les voitures allemandes. Résultat ? Merkel n’a pas cédé, et l’UE a préparé ses propres sanctions en retour.
  • Avec le Canada et le Mexique, il a remis en cause l’ALENA, avant de signer un nouvel accord très similaire… mais avec une victoire symbolique pour son électorat.

Son objectif est clair : forcer ses partenaires à négocier sous pression. Mais cette stratégie fonctionne tant que les autres croient qu’il est prêt à aller jusqu’au bout. Or, la guerre commerciale avec la Chine a montré que Pékin peut attendre et riposter.

Politique étrangère : jusqu’où peut-il menacer sans agir ?

Trump adore menacer. Mais frappe-t-il vraiment ?

  • Iran : Il a menacé Téhéran de représailles "jamais vues"… avant de se raviser après l’attaque d’un drone américain.
  • Corée du Nord : Il est passé de "Rocket Man" et de menaces nucléaires à une poignée de main historique avec Kim Jong-un. Résultat ? La Corée du Nord a continué son programme nucléaire.
  • OTAN : Il a menacé de retirer les États-Unis de l’alliance militaire… sans jamais le faire, car même le Pentagone savait que c’était une ligne rouge.

Trump sait que le pouvoir des mots est immense, mais il comprend aussi que certaines actions coûteraient trop cher. Son bluff fonctionne souvent, mais il sait aussi reculer au dernier moment.

Le vrai risque : un bluff qui tourne mal

Bluffer, c’est efficace quand personne ne veut prendre le risque d’appeler la mise. Mais il y a un danger : si un jour un adversaire décide de "voir" ses cartes, que se passe-t-il ?

  • Si la Chine décide d’accélérer la dédollarisation mondiale, Trump pourrait se retrouver face à un effondrement du dollar.
  • Si l’Europe s’émancipe des États-Unis, ses menaces sur l’OTAN ou les accords commerciaux perdront leur poids.
  • Si les Républicains eux-mêmes se lassent, son propre camp pourrait le lâcher, surtout en cas de nouvelle crise.

Bluffer fonctionne tant que personne ne veut voir la vérité en face. Mais le risque d’un faux pas est immense.

Trump, un bluffeur… mais un bluffeur gagnant ?

Trump n’est pas un stratège classique. Il ne cherche pas des solutions équilibrées, il cherche à gagner à tout prix. Son bluff fonctionne car il est imprévisible et ose aller là où d’autres hésiteraient.

Mais il joue un jeu dangereux :

  • S’il pousse trop loin, il peut provoquer un effondrement économique.
  • S’il perd en crédibilité, il risque d’être isolé politiquement.
  • S’il bluffe une fois de trop, il pourrait forcer un adversaire à réagir violemment.

Alors, jusqu’où ira-t-il ? Aussi loin que le laisseront ses adversaires. Mais comme tout joueur de poker, il doit espérer que personne ne l’oblige à abattre ses cartes.