L'ombre du passé : le Front national et ses racines controversées
Meeting des co-fondateurs du Front national avec, de gauche à droite, Pierre Bousquet, Roger Holeindre et Jean-Marie Le Pen.
Alors que l'extrême droite semble se rapprocher dangereusement du pouvoir après l'annonce choc d'Emmanuel Macron de dissoudre l'Assemblée nationale, la gauche s'alarme de la normalisation croissante du Rassemblement national (RN). Le dimanche passé, Sarah Legrain, députée de La France insoumise (LFI), n'a pas mâché ses mots sur LCI. Elle a dénoncé la complaisance de certains secteurs de la bourgeoisie et des médias envers le RN, allant jusqu'à rappeler que "mieux vaut Hitler que le Front populaire" pourrait devenir une triste réalité si nous ne restons pas vigilants.
Un passé lourd de sens
Pour justifier ses propos percutants, Sarah Legrain a invoqué l'histoire troublée du RN, ou plutôt de son prédécesseur, le Front national (FN). "Est-ce que je suis en train de dire que le Rassemblement national est un parti qui est l'héritier de Waffen-SS qui l'ont fondé et l'héritier de Vichy ? Oui bien sûr !" a-t-elle déclaré, provoquant une réaction choquée du journaliste Christophe Moulin sur LCI.
Les origines controversées
Le Front national pour l'unité française a vu le jour le 5 octobre 1972. Ce jour-là, diverses factions d'extrême droite se sont rassemblées sous la bannière de Jean-Marie Le Pen, vétéran de la guerre d'Algérie et figure de proue d'Ordre nouveau, un mouvement néofasciste. Cette alliance cherchait à présenter une façade plus respectable de l'extrême droite, malgré un passé marqué par des appels à la violence contre les "métèques" et les communistes.
Comme le souligne l'historienne Valérie Igounet, Ordre nouveau souhaitait "tuer les métèques" et "assassiner les communistes". Sur les conseils de François Duprat, une figure influente de l'époque, ils ont commencé à pratiquer ce qu'ils appelaient "un fascisme souriant".
Néofascistes, nationalistes et collaborationnistes
Les années 1960 et 1970 ont vu une convergence des diverses familles idéologiques d'extrême droite, unies par leur violent anticommunisme. Jean-Marie Le Pen incarnait le courant national-populiste, marqué par la nostalgie de l'Algérie française et les événements de Mai 68. Ordre nouveau représentait la deuxième tendance, aspirant à l'abolition des partis politiques.
La troisième composante, et la plus controversée, était celle des nostalgiques de la Seconde Guerre mondiale et de la Collaboration. Parmi les fondateurs du FN se trouvait Pierre Bousquet, un ancien Waffen-SS de la division Charlemagne, qui devint trésorier du parti. François Brigneau, ancien milicien pétainiste, fut désigné vice-président. Même Léon Gaultier, également engagé dans la Waffen-SS, faisait partie des membres fondateurs.
Un héritage toujours présent
Jean-Marie Le Pen, interrogé par franceinfo lors des 50 ans du parti, n'a pas condamné les actions passées de ses anciens camarades, insistant sur le fait que les choix de jeunesse ne devaient pas être jugés sévèrement des décennies plus tard. Pourtant, cette indulgence vis-à-vis des anciens SS souligne un lien indéniable avec un passé sombre.
En conclusion, comme le rappelle l'historien Nicolas Lebourg, les anciens SS ont joué un rôle crucial dans la reconstruction des extrêmes droites après-guerre. Il est donc justifié d'affirmer, comme le fait Sarah Legrain, que le FN – ancêtre du RN – puise ses racines dans des héritages liés aux Waffen-SS et au régime de Vichy. À l'heure où l'extrême droite gagne du terrain, il est plus que jamais crucial de ne pas oublier ces vérités historiques.
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