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Une main masculine ferme un classeur marquĂ© “Finances publiques – confidentiel”. Autour, un faisceau de lumiĂšre s’éteint, ne laissant visible que le mot “secret”. En arriĂšre-plan, un bureau de Bercy, lĂ©gĂšrement flou, ambiance froide et institutionnelle.

Introduction
On nous promet un État transparent, responsable, connectĂ©.
En pratique, la lumiĂšre baisse. Depuis la rĂ©forme du secret des affaires et la refonte discrĂšte de la politique d’open data publique, la France rend ses comptes de moins en moins lisibles.
DerriĂšre le discours de “modernisation administrative”, se cache une manƓuvre plus politique : verrouiller l’information sensible, Ă  commencer par celle sur les finances publiques et les contrats stratĂ©giques.

Le secret des affaires version XXL

En 2025, une circulaire de Bercy a Ă©largi la notion de secret des affaires aux contrats conclus par l’État avec des prestataires privĂ©s, y compris dans les domaines non militaires.
Objectif officiel : « protéger la compétitivité des entreprises françaises face à la concurrence internationale ».
RĂ©sultat concret : une opacitĂ© croissante sur les marchĂ©s publics, notamment dans les secteurs du numĂ©rique, de la dĂ©fense et de l’énergie.

Plusieurs ONG, dont Anticor et Transparency France, dénoncent une « dérive du secret ».
Les journalistes d’investigation, eux, se retrouvent face Ă  des documents caviardĂ©s, des bases inaccessibles ou des refus de communication pour des raisons « stratĂ©giques ».
La RĂ©publique n’est plus si exemplaire lorsqu’il s’agit de montrer ses factures.

Open data : du grand ménage à la grande fermeture

Depuis l’étĂ© 2025, le portail data.gouv.fr a discrĂštement retirĂ© plusieurs bases sensibles :

les données agrégées sur les marchés publics de conseil,

les subventions des ministĂšres,

et surtout, certains fichiers fiscaux consolidés sur les grandes entreprises.

La justification officielle parle de “sĂ©curitĂ© des systĂšmes” et de “lutte contre la dĂ©sinformation”.
Mais le calendrier interpelle : cette fermeture survient juste aprÚs la révélation de plusieurs rapports internes embarrassants sur la surfacturation des cabinets de conseil.

Comptabilité fusionnée, contrÎle dilué

Autre innovation comptable : la fusion de plusieurs lignes budgĂ©taires sous des intitulĂ©s aussi flous que “Soutien aux politiques transversales” ou “Coordination interministĂ©rielle”.
En clair, des enveloppes globales oĂč se mĂ©langent sĂ©curitĂ©, communication, et conseil privĂ©.
Impossible de savoir combien coûte telle mission ou tel contrat.

Ce brouillage sert deux maßtres : la souplesse politique et la discrétion financiÚre.
On peut ainsi dĂ©placer des millions d’euros sans vote parlementaire ni contrĂŽle citoyen.

L’État qui s’audit lui-mĂȘme

Le paradoxe est lĂ  : pendant qu’on coupe dans les dĂ©penses sociales, l’administration se dote de nouveaux outils d’audit
 internes.
Les rapports sur la performance de l’action publique sont dĂ©sormais rĂ©digĂ©s par les services mĂȘmes qui sont Ă©valuĂ©s.
La Cour des comptes, marginalisĂ©e, n’a plus accĂšs qu’à des rĂ©sumĂ©s.
Le contrĂŽle devient circulaire : l’État s’auto-Ă©value, puis s’auto-absout.

Conclusion : la transparence, c’est quand tout est flou

À force de rĂ©formes “modernes”, la dĂ©mocratie budgĂ©taire s’effrite.
On parle de participation citoyenne, mais on retire les données.
On invoque la responsabilité, mais on ferme les comptes.
Bref, l’État français a perfectionnĂ© l’art de rendre le secret lĂ©gal et la transparence optionnelle.

La “sobriĂ©tĂ© budgĂ©taire” du premier volet et cette “opacitĂ© comptable” du second forment un tout :
un pays qui se serre la ceinture
 mais qui cache la boucle.

 

🇬🇧 English version – “Transparency under Seal: How the French State Locks Its Own Books”

Introduction
France loves to preach transparency — open data, accountability, modern governance.
In reality, the lights are dimming.
Behind the rhetoric of modernization lies a quieter ambition: to lock down financial information, starting with the State’s own accounts.

The Secret of Secrets

In 2025, the Finance Ministry quietly expanded the legal definition of trade secrets to include contracts between the State and private firms — even outside the defense sector.
The official aim: “protect French competitiveness.”
The effect: journalists and citizens can no longer track where public money goes.

NGOs like Anticor and Transparency France denounce a “creeping culture of secrecy.”
Investigative reporters now face blacked-out documents and data “unavailable for security reasons.”
Accountability has been reclassified as a competitive risk.

From Open Data to Closed Doors

Since mid-2025, data.gouv.fr — the French government’s open data portal — has quietly removed several key datasets:

  • public consulting contracts,
  • ministerial subsidies,
  • and corporate tax records.
    The justification? “Cybersecurity” and “misinformation prevention.”
    The timing? Right after leaks exposing overbilling by consulting firms.

Budget Fog

A new trick of the trade: merging budget lines into vague headings like “Cross-ministerial support” or “Policy coordination.”
It’s the fiscal equivalent of mixing colors until everything turns grey.
Security, PR, and private consulting now share the same envelope — impossible to tell one from another.

This accounting fog serves two purposes: political flexibility and financial invisibility.

The State Audits Itself

Ironically, while it cuts social spending, the State has expanded its self-audit units.
Performance reports are written by the very ministries they assess.
The Court of Auditors is sidelined, left with sanitized summaries.
It’s oversight by mirror: the State evaluating the State.

Conclusion – When Everything Is Transparent, Nothing Is Visible

Transparency has become a slogan without substance.
Budgets merge, data vanish, journalists hit legal walls — and citizens are told it’s for their own safety.
In this new fiscal era, austerity meets opacity: the people pay, the State hides.