Et maintenant?

Le risque en train de poindre, du côté de l’Élysée, est celui d’une possible dérive autoritaire. Je pèse mes mots. Mais au vu des finances publiques françaises à bout de soufflée, du contexte international marqué par la guerre en Ukraine, et des échéances à venir telles que la Coupe du monde de Rugby cet automne et les Jeux Olympiques d’été 2024, Emmanuel Macron est bien plus sous pression qu’il ne l’était au moment des gilets jaunes.
En clair: ce président incapable de donner du sens à son second mandat a besoin d’urgence d’un retour à l’ordre. Il sait que si la violence urbaine s’installe et que l’épuisement policier guette, son quinquennat virera au cauchemar. Marchés financiers en embuscade alors que la France doit emprunter cette année 270 milliards d’euros, partenaires européens dubitatifs, majorité législative introuvable… Plus les Français se cabrent, plus Macron risque d’être désarçonné.
Une solution pour ramener le calme est de mettre en mode pause la réforme des retraites, comme vient encore de le suggérer le patron du syndicat réformiste CFDT Laurent Berger, juste après avoir confirmé une nouvelle journée d’action le 28 mars. Mais cela signifierait, pour ce président résolu à avancer «à marche forcée», une capitulation. Une autre option serait de frapper un grand coup politique: référendum ou dissolution de l’Assemblée, ce qui semble pour l’heure exclu par l’Élysée.
Reste donc l’autre alternative: taper fort.
Jacques Chirac avait, le 8 novembre 2005, autorisé le gouvernement de Dominique de Villepin à décréter l’État d’urgence pour mettre fin aux émeutes de banlieue, déclenchées par la mort de deux adolescents près de Paris. Mais il s’agissait alors d’un autre type de violences. Cette fois, C’est une partie du pays que cette réforme des retraites, aussi justifiée soit-elle sur le fond, a antagonisé et radicalisé. Et ce, alors que l’Assemblée nationale est fragmentée, et que les extrêmes prospèrent, à droite comme à gauche.
Croire que la politique du coup de poing ramènera le calme est dès lors très hypothétique. Le plus probable est que le couvercle policier, s’il se referme, n’empêchera pas la France de continuer de bouillir. Bien qu’il soit impeccablement conforme à la constitution et qu’il ait été très souvent utilisé, le recours à l’article 49.3 pour faire adopter cette réforme a ouvert un dangereux procès en illégitimité.
S’il fait le choix d’une dérive autoritaire, Emmanuel Macron ne fera que l’amplifier. Dans un pays où la défiance envers les élites est aujourd’hui le carburant de tous les populismes. Et de toutes les violences.